Mise à jour du 16 novembre 2016 de cet article de janvier 2012 – Le graphique de la balance commerciale ci-dessous s’arrêtait à 2011: je viens d’ajouter les données de 2012 à 2015 et j’ai revu la somme des différentiels depuis 2000 pour la porter jusqu’en 2015. Les montants du PIB et de la dette publique française ont également été mis à jour.
Un décrochage vertigineux
Rien n’est plus significatif de ce décrochage que le solde du commerce extérieur. Le graphique ci-dessous permet de comparer les résultats français et allemands sur une quinzaine d’années:
Si l’on additionne les différentiels de 2000 à 2013, la richesse nationale de la France est en déficit par rapport à l’Allemagne de plus de 3120 milliards d’euros. Pour se faire une idée de ce manque à gagner par rapport à l’Allemagne, il faut le mettre en relation avec une année de PIB français : environ 2181 milliards d’euros (pour l’année 2015) ou le montant de la dette de l’Etat français : 2200 milliards d’euros (montant de 2015).
Autant dire que sur le plan de la balance commerciale, le décrochage de la France par rapport à l’Allemagne est colossal. Pour le rendre encore plus concret, il suffit d’observer le graphique montrant l’évolution du montant des exportations vers la Chine. Il se trouve dans un rapport du Conseil d’Analyse Economique sur L’émergence de la Chine : impact économique et implications de politique économique (pdf) remis au gouvernement français le 20 mai 2011 :
Depuis plusieurs années, au moment où sont rendus publics les chiffres du commerce extérieur, les mêmes commentaires reviennent avec une régularité saisonnière pour déplorer ce décrochage et analyser la réussite allemande en matière d’exportations. On mentionne notamment la capacité de l’Allemagne à préserver un tissu industriel dense, le dynamisme de ses très nombreuses entreprises de taille moyenne, le positionnement des produits allemands sur le haut de gamme, le développement de la sous-traitance en Europe de l’Est, le coût du travail ou encore le niveau des salaires permettant aux produits allemands d’être plus compétitifs que les produits français.
Je ne reviendrai pas sur ces différents éléments abondamment cités dans la presse. Je souhaite plutôt attirer l’attention sur deux leviers de performance souvent méconnus mais déterminants dans la capacité à capter des contrats à l’international. Or, ils sont d’autant plus importants côté allemand qu’ils sont inexistants ou négligés côté français. Ces deux leviers conditionnent en amont la compétitivité et la performance économique :
- D’une part, il s’agit de la capacité de l’Allemagne à susciter l’innovation par un système de rémunération motivant pour les inventeurs salariés.
- D’autre part, l’Allemagne sait placer ses experts à l’international de façon à développer de l’influence intellectuelle et technique pour conditionner à terme les marchés étrangers au profit de ses entreprises.
1. Le levier de l’innovation
Nous aurons beau analyser en France dans tous les sens les différences structurelles qui nous séparent du modèle allemand, ce travail restera sans aucune portée tant que nous laisserons de côté l’origine primordiale du décrochage français en matière d’innovation par rapport à l’Allemagne : l’absence d’un système de rémunération motivant pour les inventeurs salariés.
Pour résumer, il faut imaginer que vous êtes ingénieur R&D au sein d’un grand groupe français. Vous inventez un produit ou une amélioration d’un produit qui va apporter un avantage compétitif de votre entreprise par rapport à ses concurrents, décupler ses bénéfices et augmenter sa valeur boursière, et donc la valeur des stock options de ses dirigeants. Comment se manifeste financièrement la reconnaissance de votre entreprise ?
Dans le meilleur des cas, vous toucherez une prime forfaitaire s’élevant le plus souvent de 500 à 2500 euros. Précision : il s’agit d’euros bruts… Dans un tiers des cas, il ne se passera… rien, car votre entreprise n’a pas prévu de système de rémunération de l’invention des salariés. Et dans certains cas, vous serez mis au placard pour avoir eu la prétention de réclamer quelque chose. Dans le pire des cas, vous serez tout simplement… licencié.
J’ai déjà analysé en détail ce système absurde dans l’article L’innovation en France et ses freins culturels. Dans cet article, j’ai mis en graphique les résultats d’une étude de l’INPI montrant le montant moyen des primes accordées aux inventeurs salariés. Le revoici :
Imaginons à présent que vous êtes en Allemagne. Il existe dans ce pays depuis le 25 juillet 1957 une loi qui fixe le cadre légal de la rémunération des inventeurs salariés. Cela fait donc plus de cinquante ans que les inventeurs salariés peuvent bénéficier d’une compensation financière proportionnelle au chiffre d’affaires généré par l’invention. Autrement dit, il s’agit d’un pourcentage sur les bénéfices dont le montant fait l’objet d’une concertation entre l’employeur et le salarié dans le cadre de la loi.
Imaginons que vous êtes en… Chine. Depuis 2010, l’inventeur salarié a droit à une prime forfaitaire et à une rémunération annuelle supérieure ou égale à 2 % des revenus générés par l’exploitation du brevet ou du modèle d’utilité (0,2 % pour un dessin et modèle), ou un pourcentage d’au moins 10 % des royalties en cas de concession de licence.
Autant dire que le système français n’incite pas à l’innovation. Et même il la décourage: voyez sur ce blog le témoignage d’un ingénieur R&D français qui a quitté la France pour l’Allemagne. Je vous invite également à explorer le blog de Jean-Paul Martin, avocat spécialiste de la propriété intellectuelle, qui alerte depuis de nombreuses années sur les effets néfastes de notre absence de reconnaissance financière des inventeurs salariés. Le fait est que chaque fois qu’un projet de loi plus favorable aux inventeurs salariés a été présenté au parlement, il a fait l’objet d’attaques violentes de la part du MEDEF pour qu’il ne soit pas voté.
Je fais mienne l’interrogation de Jean-Paul Martin :
- Pourquoi ce que l’on accepte dans le secteur bancaire – où des salariés (les traders) sont rémunérés en fonction des bénéfices qu’ils génèrent pour leur établissement – est-il refusé au secteur industriel où la compétitivité des entreprises se joue sur les innovations initiées par les chercheurs et ingénieurs?
Il faut le dire et le répéter avec force : le système français de motivation et rémunération des inventeurs salariés est rétrograde et contre-productif. C’est là un facteur important du décrochage de la France par rapport à l’Allemagne. Or, remédier à cette situation est en soi une démarche à la fois simple et à terme extrêmement bénéfique en termes de compétitivité, et donc d’emplois. A quand donc une volonté politique forte sur ce sujet et un projet de loi à la hauteur des enjeux ?
2. Le levier de l’expertise internationale
Les performances de l’Allemagne à l’exportation ne sont pas seulement dues à sa capacité à innover et à maintenir une industrie puissante. Les analyses négligent souvent un facteur fondamental en se focalisant uniquement sur le nombre de contrats à l’international gagnés par les Allemands : toute conquête commerciale se prépare en amont.
L’une des grandes différences entre la France et l’Allemagne consiste en effet dans la capacité de cette dernière à déployer une stratégie de positionnement de ses experts auprès des instances nationales et internationales. Dans de très nombreux pays, la demande d’experts explose depuis quelques années. Elle sera multipliée par trois ou quatre d’ici 2020. Le pays émetteur d’expertise conditionne à l’avantage de ses entreprises les marchés des pays récepteur d’expertise.
Je m’appuie ici sur le rapport de Nicolas Tenzer du 7 mai 2008 : L’expertise internationale au cœur de la diplomatie et de la coopération du XXIe siècle – Instruments pour une stratégie française de puissance et d’influence (pdf). Le constat de Nicolas Tenzer est sans appel : « Il n’y a pas aujourd’hui en France de politique d’expertise internationale. »
Ce rapport devrait être une lecture obligatoire pour toute personne concernée par la situation économique de la France et sa capacité à exercer de l’influence dans le monde. Nicolas Tenzer insiste sur la dimension stratégique de l’expertise internationale. L’influence, ce n’est pas la satisfaction de rayonner pour rayonner mais la faculté de conditionner le potentiel d’une situation à son avantage :
« L’influence intellectuelle passe d’abord par la production d’idées, leur diffusion et leur défense auprès des organismes qui peuvent à leur tour les porter, les développer et les faire entrer dans des recommandations ou même des règles utilisables dans l’action. Celles-ci deviennent progressivement des normes et des principes qui structurent les interventions des acteurs internationaux de toute nature. » (p.88)
Or, la France ne sait pas exercer cette influence intellectuelle par ignorance des appels d’offre en matière d’expertise internationale, par absence d’implication des acteurs concernés, par manque de coordination entre secteurs public, privé et universitaire, par focalisation sur le seul coût du placement d’experts, ou encore – et très souvent – par impossibilité de trouver des experts parlant anglais et sachant produire de la connaissance en anglais.
A titre d’exemples, ce sont les Allemands qui conseillent les Chinois en matière de droit de la propriété intellectuelle tandis que les Japonais les conseillent sur le droit commercial. Les Allemands, les Britanniques, les Canadiens, les Suédois, les Américains ont tous des réseaux d’experts, universitaires et privés, pour être présents dans les appels d’offres des Etats et des organisations internationales. Invisible en dehors de ses frontières dans ces organisations et dans les think tanks, la France est en dehors du débat mondial. Il se fait sans elle.
Nicolas Tenzer a publié une version grand public de son rapport : Quand la France disparaît du monde. On peut y lire ce passage :
« Qui, par la présence d’une dizaine d’ingénieurs au ministère chinois des Transports, définit les normes techniques des chemins de fer chinois ? Qui, en Chine encore, a fourni les principaux concepts pour la législation sur la propriété intellectuelle ? Qui, en Chine toujours, forme en nombre des ingénieurs chinois ? Qui, au Brésil, dispose de quarante experts techniques et de près de 60 millions d’euros de crédits essentiellement destinés aux politiques d’environnement et d’emploi ? Qui, au Vietnam, est le maître d’œuvre de la politique de santé et peut aligner dix présidents de groupes pharmaceutiques autour du Premier ministre vietnamien le jour de la fête nationale ? Qui, en Europe centrale et orientale, mais aussi en Inde, dans d’autres pays d’Asie et en Amérique latine, dispose d’un maillage permanent, par le biais de fondations, de centres recherche ou d’universités, avec le milieu intellectuel de ces pays ? Qui, en Inde, oriente les projets de la Commission européenne, est présente depuis cinquante ans et développe des projets ambitieux en matière d’environnement, d’efficacité énergétique et de développement économique ? Qui, pour boucler encore avec la Chine, est capable de présenter des projets cohérents et bien construits aux organisations internationales sur place ? L’Allemagne. » (p.58)
Autrement dit, la réussite de l’Allemagne à l’international n’a rien d’énigmatique, encore moins de miraculeux. Elle récolte les bénéfices d’un patient travail de fond sur le plan de l’influence intellectuelle et technique, résultat d’une vision stratégique appuyée par une volonté politique forte. Après l’incitation à l’innovation sur le plan national, c’est là sur le plan international le deuxième facteur qui permet de comprendre de décrochage de la France par rapport à l’Allemagne.
Tant que ces deux leviers amont de la croissance et de la compétitivité resteront bloqués en France, il n’y aura pas de rattrapage.
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Quelques suggestions de lecture:
- Interview sur France 24: Coca-Cola, le global et le local
- L’innovation en France et ses freins culturels – 2e partie
- L’innovation en France et ses freins culturels – 1ère partie
- Gestion des Risques Interculturels – 6 articles de 2013
- Freins culturels à l’innovation en France : un inventeur salarié témoigne
- L’interculturel à travers l’histoire : 5 articles à lire à la plage ou… au bureau
Une question me semblant essentielle n’a pas été posée :
Pourquoi les entreprises françaises ne donnent-elles pas d’elles-même une récompense significative au salarié ? C’est pourtant leur intérêt de long terme, c’est-à-dire l’intérêt des actionnaires que d’attirer les salariés méritants.
@Brice – En effet, c’est une question essentielle que je vous invite à poser au MEDEF qui s’oppose depuis toujours à une forme plus avantageuse de rémunération pour les inventeurs salariés. Serait-ce qu’il y aurait une réticence à voir des salariés gagner autant, sinon plus que leurs dirigeants? Mais alors, dans ce cas, pourquoi est-ce possible dans la finance où les traders sont payés bien plus que leurs patrons?… Alors même que leurs performances n’ont pas autant d’impact que les innovations des ingénieurs R&D sur l’activité économique et industrielle – et donc sur l’emploi – en France…
Le MEDEF est dans son rôle lorsqu’il veut éviter qu’une contrainte supplémentaire ne s’abatte sur ceux qu’ils représentent.
Je suis moi-même sceptique face au projet de loi en question. En quelque sorte par ce texte, l’État dirait qu’il sait mieux que les entreprises ce qui est bon pour elles. Quand on sait le gaspillage quotidien opéré par l’État, on se dit qu’il ferait mieux de balayer devant sa porte avant de vouloir régenter les vie de ses administrés.
Ce qui nous ramène à ma question : pourquoi les entreprises n’encouragent pas d’elles-mêmes les salariés ?
J’ai deux propositions d’explication :
1) La jungle fiscale et réglementaire qui freine considérablement le développement des PME qui n’ont pas les moyens de se payer une armée de juristes. Or ce sont les PME qui innovent car elles sont par leur taille faciles à manœuvrer et qu’elle doivent apporter un plus par rapport aux grandes entreprises qui ont pour elles les économies d’échelle.
2) La sur taxation du capital qui décourage l’investissement risqué et qui par conséquent :
– dilue l’actionnariat des entreprises. Ces dernières ne sont plus alors contrôlées par les actionnaires mais par les dirigeants-salariés qui voient leur intérêt à court terme (thèse de Pascal Salin) ;
– réduit la part de financement par fonds propres des entreprises, encourageant même les actionnaires à une forte rentabilité de court terme, car il n’ont pas grand chose à perdre.
Or voir loin est important quand il s’agit de conserver les meilleurs salariés et d’attirer ceux qui ont fait leurs preuves ailleurs.
Les traders rapportent de l’argent à court terme, c’est probablement ce qui fait la différence, alors que la R&D dans l’industrie demande du temps. De toute façon les banques sont un monde à part car elles ont des privilèges exorbitants, dont celui de créer de la monnaie, générant des bulles, et parce que les Banques Centrales sont là pour les secourir en cas de problème, d’où un aléa moral. Tout ceci favorise la vue à court terme. Bref, il faudrait supprimer les Banques Centrales, mais c’est un autre débat…
En résumé : plutôt que d’essayer de contrebalancer les effets indésirables de la réglementation en vigueur par de nouvelles réglementations qui généreront probablement de nouveaux problèmes, il vaudrait mieux s’attaquer aux causes et supprimer les réglementations problématiques. Cela implique de mettre de l’ordre dans les finances publiques, ce que nos chers gouvernants n’aiment pas…
Pour ma part, je m’en tiens au fait que sans obligation légale je ne vois pas comment il y aurait une amélioration de la situation. Pour reprendre une comparaison chère à notre Président, l’Allemagne a instauré avec succès un tel système et ce depuis fort longtemps. La Corée a adopté également un dispositif légal, suite à une jurisprudence. Plus récemment, la Chine s’y est mise. Après, il est certain que sa mise en place peut être problématique, complexe et lourde au sein notamment de nos PME qui n’ont ni la taille ni les moyens des PME allemandes…
Fidèle lecteur de ce blog, je corrobore toutes ces analyses passionnantes avec d’autres informations et ma connaissance de certains milieux. Si on prend un peu de recul, on s’aperçoit que c’est tout le macro système de la France qui dysfonctionne. Je me posais il y a encore quelques temps la question suivante : est-ce que le bateau France n’est pas en train de prendre l’eau ? Aujourd’hui, je crois que la question serait: avons-nous les moyens d’écoper ? Tout porte à penser que non !
JG
Il faut savoir qu’en Allemagne, on peut se loger pour 100 euros par mois si on cherche bien. Evidemment cela motive pour commencer à travailler, d’être à même de quitter le nid familial…
Brillant article. Avez-vous contribué à la Stratégie Nationale Recherche (http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid77735/strategie-nationale-recherche-participez-consultation-publique.html)?
C’est jusqu’au 10 mai et je pense que votre article en l’état me semble tout à fait intéressant pour eux.
@Luc – Merci pour ce retour et le lien. Je ne sais dans quelle mesure ce genre de consultation a une suite réelle ou est un simple effet de communication…
…qui apporte son appui à la compétitivité et à la croissance des PME au Sénégal depuis 1977 ?
Vous nous mettez l’eau à la bouche, Philippe… Des précisions et un lien vers un article sur le sujet?…
Bonjour,
Désolée de vous contre-dire mais la difficile et insuffisante rémunération des inventeurs salariés ne résulte pas des dispositions législatives mais de pratiques managériales et de rapport de force d’un autre temps. Les dispositions légales permettent une rémunération proportionnelle par exemple au CA. La Cour de cassation, lorsqu’elle est saisie de ce type de litige confirme des indemnisations supérieure à 10 fois le montant versé par l’entreprise et écarte les conventions collectives qui limitent les droits des inventeurs salariés (cf jurisprudence de 2013). Il en sera de même pour les clauses du contrat de travail.
Une modification de la législation ne changera rien. Le problème réside, peut-être dans la connaissance de la loi mais surtout dans les rapports employeurs-salariés. On peut parler de fraudes, d’abus de pouvoir, de mauvaise foi de l’employeur, etc. Le droit français ne corrobore absolument pas ces pratiques parfaitement illégales.
Voici des liens qui étayent mes observations
http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000027076410&fastReqId=785739450&fastPos=1
http://www.journaldunet.com/management/expert/50918/inventeurs-salaries—les-tribunaux-envisagent-volontiers-l-interessement-au-pourcentage.shtml
http://www.inventionsalarie.com/
Article L611-7 Code de la propriété intellectuelle (CPI)
Si l’inventeur est un salarié, le droit au titre de propriété industrielle, à défaut de stipulation contractuelle plus favorable au salarié, est défini selon les dispositions ci-après :
1. Les inventions faites par le salarié dans l’exécution soit d’un contrat de travail comportant une mission inventive qui correspond à ses fonctions effectives, soit d’études et de recherches qui lui sont explicitement confiées, appartiennent à l’employeur. Les conditions dans lesquelles le salarié, auteur d’une telle invention, bénéficie d’une rémunération supplémentaire sont déterminées par les conventions collectives, les accords d’entreprise et les contrats individuels de travail.
Si l’employeur n’est pas soumis à une convention collective de branche, tout litige relatif à la rémunération supplémentaire est soumis à la commission de conciliation instituée par l’article L. 615-21 ou au tribunal de grande instance.
2. Toutes les autres inventions appartiennent au salarié. Toutefois, lorsqu’une invention est faite par un salarié soit dans le cours de l’exécution de ses fonctions, soit dans le domaine des activités de l’entreprise, soit par la connaissance ou l’utilisation des techniques ou de moyens spécifiques à l’entreprise, ou de données procurées par elle, l’employeur a le droit, dans des conditions et délais fixés par décret en Conseil d’Etat, de se faire attribuer la propriété ou la jouissance de tout ou partie des droits attachés au brevet protégeant l’invention de son salarié.
Le salarié doit en obtenir un juste prix qui, à défaut d’accord entre les parties, est fixé par la commission de conciliation instituée par l’article L. 615-21 ou par le tribunal de grande instance : ceux-ci prendront en considération tous éléments qui pourront leur être fournis notamment par l’employeur et par le salarié, pour calculer le juste prix tant en fonction des apports initiaux de l’un et de l’autre que de l’utilité industrielle et commerciale de l’invention.
@ Brigitte – Je vous suis totalement sur les pratiques managériales et les rapports de force “d’un autre temps“. Mais l’absence d’un cadre légal contraignant a pour effet d’accentuer le rapport de force au détriment du salarié. L’entreprise n’a aucune raison de rétablir ce rapport de force puisque, de toute, façon, rien ne l’y oblige.
Par ailleurs, le fait que le CPI délègue cette question aux “conventions collectives” est une façon de se laver les mains de ce que font – et surtout de ce que ne font pas les entreprises.
Le salarié dans son bon droit ne trouve par ailleurs pas forcément d’appui lors de son recours en justice, cf ce cas – et tous les autres cas rassemblés sur son blog par l’avocat en propriété intellectuelle Jean-Paul Martin.
Pratiques managériales archaïques et cadre légal sont les deux faces d’un même problème. Le Medef l’a bien compris en faisant un lobbying intense pour bloquer toute évolution de la législation en faveur des inventeurs salariés.
Bonjour,
Pour avoir travaillé en Tunisie dans le cadre d’un projet d’expertise et de développement, je peux vous dire qu’au moins en Afrique et dans le bassin méditerranéen les experts français existent, sont recherchés et occupent souvent des postes stratégiques, du fait notamment de leur plurilinguisme (français, anglais, et parfois arabe, langues africaines), la question porte sur les employeurs : agences françaises certes mais souvent allemandes, canadiennes, japonaises, etc. Vous dites que l’expertise française souffre de connaissance en anglais, mais c’est à mon sens un faux argument, tout d’abord parce que les écoles françaises d’ingénieurs et de commerce se sont converties à l’anglais jusqu’à l’excès, ensuite parce que rien n’empêche l’expertise française de recruter des anglophones, enfin parce que même dans les pays francophones (17% du PIB mondial) l’expertise française, pourtant reconnue, n’arrive pas en première position. Je n’ai pas d’explication et je trouve intéressant que vous en proposiez même si je ne suis pas d’accord avec l’ensemble d’entre elles (notamment la langue) mais je pense que le problème est véritablement culturel : des écoles à l’entreprise, les responsables (non étatiques) français propagent l’idée que l’innovation est l’affaire des étrangers ; je pense que les meilleurs Français sont très tôt tentés de s’expatrier sans prendre la peine de chercher en France car on les incite expressément à partir, encore une fois rien que le fait que les écoles de commerce soient passées à 100% de cours en anglais pour ouvertement recruter des Thaïlandais, des Américains, des Chinois, des Coréens n’est pas à mon sens un bon signe envoyé aux étudiants français ou francophones tentés de travailler pour des entreprises françaises : c’est l’idée que l’histoire se fait à Hong-Kong, à Taïwan, à Séoul ou que sais-je. Pourquoi les Français n’investissent-ils pas par exemple le marché africain, pour préparer en amont le réveil du continent. Nous ne l’avons pas fait pour la Chine alors que nous avons été le premier Etat occidental à la reconnaître, on en voit les conséquences.
@Dorian – Merci pour ce retour d’expérience riche d’enseignement. Bien sûr que les experts français existent, sont reconnus et demandés. Le passage concernant le déficit en langue anglaise provient de l’étude de Nicolas Tenzer. C’est un constat qu’il fait lorsqu’il a exploré les organismes lançant des appels d’offres d’expertise pour de la production de connaissance en anglais. Sur ce sujet, voyez ce qu’en dit le géographe Michel Foucher quand il parle de “franco-sphère” à la fin de cet article.
Ayant travaillé 15 ans ds le recrutement franco-allemand et eu de longs entretiens et contacts avec les PME ds 2 pays, ls ayant vues à l’oeuvre sur les salons internationaux, ne peux que confirmer à 100%
Les spécialistes allemands sont dans les commissions chargées de fixer les NORMES industrielles- meme en France d’ailleurs – en raison de leur expertise ET de la maîtrise de l’anglais
Qd je lis que ls Français maitriseraient tous l’anglais, cela me fait sourire
Ilş disent certes “parler” anglais, mais quand on nes ecoute parler, c’est souvent incompréhensible 1) â cause de leur prononciation
2) a cause de leur non-maitrise de la grammaire, ce qui rend les phrases incompréhensibles.
Ds ds colloques internationaux de chercheurs, si on n’a pas le texte ecrit, on comprend très mal un Français s’exprimant en anglais. Qd un Français est pr3vu au programme, les participants vont se promener. Souvent ils ne se donnent même pas la peine de parler et decrire en anglais, ils s’expriment et écrivent en français.
A l’origine, selon mon expérience ds 2 pays, tout vient de l’Education depuis l’âge préscolaire
En Allemagne, éducation à la responsabilisation et lautogestion
En France, infantilisation