Dans le cadre d’un cours en executive MBA MRSIC (Management des Risques, Sûreté Internationale et Cybersécurité) à l’École de Guerre Économique, où je développe la gestion des risques interculturels, j’ai fait travailler des groupes d’étudiants sur la culture de la cybersécurité dans différents pays (Allemagne, Israël, Corée du Sud, Suède).
Parmi les contraintes, il y avait la nécessité de mener au moins deux entretiens avec des experts pour mieux comprendre le contexte sociétal de ces pays afin d’éclairer leur approche de la cybersécurité. Le groupe ayant travaillé sur la Corée du Sud a pu interviewer Arnaud Vojinovic, qui a une forte expertise interculturelle sur les relations franco-coréennes.
Comme les propos de M. Vojinovic apportent un éclairage utile à toute personne s’intéressant à la Corée du Sud, je le publie ici avec l’accord des étudiants (Youssouf Mahamat Adawi, Victor de Carvalho, Yollanda Divi, Stéphane Doyen, Sami Mokni), de l’encadrement de l’École de Guerre Économique et de M. Vojinovic. Merci à chacun d’entre eux.
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Après avoir été responsable RH et ensuite consultant en management, Arnaud Vojinovic collabore maintenant avec deux sociétés sud-coréennes, l’une basée à Daegu et l’autre à Séoul, qui travaillent dans le domaine de la formation. Consultant en management interculturel spécialisé sur la Corée, il intervient en entreprise et en école de commerce sur des problématiques liées à ce pays ou à ses voisins.
Une relation franco-coréenne entre malentendus et pragmatisme
Etudiants MRSIC : A partir de votre large expérience des relations franco-coréennes, quels constats pouvez-vous partager sur l’approche interculturelle du marché coréen par les Français?
Arnaud Vojinovic : Les Coréens sont méconnus des entreprises françaises. Ces dernières commencent à travailler avec les entreprises coréennes sans se poser de questions. Un jour, on va droit dans le mur et là on décide d’envoyer toutes les équipes en formation en plusieurs phases, et il n’est pas rare de voir ensuite le N+1 et N+2 venir aussi en formation pour essayer de comprendre ce qui s’est passé et quelles sont les solutions possibles. Mais c’est limite trop tard, car avec les Coréens quand on est confronté à un problème, il est très compliqué de rebâtir une relation. Quand on propose des solutions impliquant un investissement sur les relations sociales, on nous explique qu’il n’y a pas de budget suffisant ni le temps nécessaire pour mettre en place ce type de solution.
Est-ce que vous formez aussi les Coréens sur la culture française ?
En fait, j’ai formé des Chinois afin qu’ils puissent travailler avec les Coréens, j’ai formé des Japonais à travailler avec les Coréens, mais j’ai rarement formé de Coréens à travailler avec les Français. Après réflexion, je me souviens d’avoir formé l’équipe coréenne d’un chaebol [conglomérat] en France. L’entreprise comprend 400 salariés en France dont 19 Coréens. Le directeur général de la filiale et le directeur financier par exemple sont coréens. Il doit y avoir une dizaine de départements dans l’entreprise, et chaque département est dirigé par un binôme français / coréen. Il n’y a qu’à ce moment-là que j’ai formé des Coréens, si on exclut les expatriés qui sont envoyés en formation par une entreprise française. En Corée, la formation est une prérogative du manager de proximité.
D’ailleurs, le « manager » est-il conçu de la même façon par les Coréens ? Quelles seraient les spécificités de l’organisation de l’entreprise coréenne ?
Il faut savoir tout d’abord que dans les entreprises coréennes on ne rentre pas directement N +3. En début de carrière on commence en bas de l’échelle. Pour ne parler que des cadres, l’organisation est très codifiée et, par exemple dans le secteur public, l’échelle va de 1 à 9. Le numéro 1, c’est le ministre et au niveau 4 ou 5 on est au niveau du chef de bureau, ce qui correspond à peu près au niveau cadre ou manager en France. Entrer dans une entreprise directement à une position d’encadrement est très spécifique à la France. En Corée, vous rentrez stagiaire pour voir si vous vous intégrez dans l’équipe. Si vous êtes confirmé comme stagiaire vous devenez assistant. Vous restez un an assistant puis vous changez de poste. Soit vous avez un nouveau poste au niveau horizontal : par exemple, vous étiez en compta et vous passez au même poste mais en recherche-développement, qui est un service plus valorisant, et ensuite vous montez dans la hiérarchie ; soit il peut y avoir des promotions verticales : vous restez un ou deux ans assistant, vous devenez adjoint pendant trois ans, vous devenez manager 3 à 4 ans puis vous devenez chef de département. De fait, quand vous êtes stagiaire, vous ne connaissez rien et ce sont soit des assistants soit les adjoints qui vous forment. Et c’est comme ça que s’apprend le métier. Vous passez dans différents postes, différents services, et lorsque vous arrivez à cinquante ans comme chef de département vous connaissez parfaitement l’entreprise.
Doit-on comprendre que, dans les entreprises coréennes, les salariés ne changent pas de société ?
C’est le cas en Chine où l’on trouve des mercenaires, où ils cherchent les postes les mieux payés. Il y a un turnover extrêmement important en Chine. Ce n’est pas le cas en Corée, à moins que le management soit difficile. Dans ce cas, quand des collaborateurs quittent l’entreprise, ils sont généralement suivis par toute l’équipe. C’est une hémorragie. On voit bien que c’est une culture de groupe. Par ailleurs, à l’OCDE il n’y a pas de données sur la Corée pour le taux d’occupation pour une ancienneté donnée. Mais la dernière statistique sur le sujet indique que les salariés restent dans une entreprise 5,9 ans en moyenne. Un taux très faible. Je pense qu’il y a deux habitudes différentes si on travaille dans un chaebol ou si on travaille dans une PME où les conditions salariales sont souvent très mauvaises. Ce qui serait confirmé par les statistiques sur le Japon où 47% des salariés en 2017 ont plus de 10 ans d’ancienneté dans leur entreprise (44,6% pour la France en 2020).
Mais comment un Coréen va-t-il apprendre à travailler avec des Français ? Qui leur apprend ?
Personne ne leur apprend, le Coréen est très pragmatique, il est très ouvert. Voyez les noms de famille : un Coréen ne vous corrigera pas la prononciation de son nom car de son point de vue si cela vous convient alors il n’a pas de souci avec ça. L’important pour le Coréen, c’est que l’on se comprenne. Il y a pourtant certaines choses que les Français font, qu’ils ne comprennent pas, comme continuer à travailler pendant l’heure du repas mais d’une manière informelle. Il faut leur expliquer que les Français travaillent à la machine à café, qu’ils font des réunions informelles avec des échanges d’informations, qu’une fois sur deux ils parlent de travail pendant qu’ils mangent. C’est difficilement compréhensible pour les Coréens.
Dans l’un de vos articles, vous citez une anecdote où d’un côté nous avons le manager qui crie sur son subordonné et où de l’autre le respect de l’autorité prime sur tout le reste. Pourquoi le manager aurait-il besoin de hurler ainsi sur ses subordonnés ?
Le manager pète les plombs mais ce type de comportement est considéré comme un échec D’ailleurs, le législateur essaie de faire évoluer les lois pour réprimer ce type de réaction. Il existe sur Netflix une série qui s’appelle Misaeng, et qui est très représentative de la vie en entreprise en Corée du Sud. Le Coréen n’aime pas les dramas qui font revivre dans la sphère familiale ce qu’il vit dans l’entreprise. Il veut plutôt des films de divertissement, de type comédie. Toutes les séries télé sont soit des intrigues historiques, soit des romances, soit sur des enjeux sociaux, avec par exemple une famille confrontée à l’arrivée d’un homosexuel, mais très peu se déroulent dans le monde d l’entreprise. Si c’est le cas, c’est dans le registre du burlesque. À l’inverse, cette série (Misaeng) permet de voir de manière réaliste comment fonctionne une entreprise en Corée. Dans l’un des épisodes, un assistant fait une énorme boulette. Le président de l’entreprise surgit pour réprimander la personne concernée mais il n’a pas besoin de faire d’esclandre sa présence seule suffit pour signaler la faute. Le président parti, le N+2 hurle sur son assistant. Pour montrer que ce n’est pas accepté dans la société, tous les employés interrompent alors ce qu’ils font, se retournent et fixent le fautif sans rien dire. L’idée est de démontrer que nous sommes dans une société en Corée du Sud où le jugement social prévaut sur le reste.
La singularité coréenne en Extrême Orient
Comment les Coréens concilient-ils tradition et modernité ?
La modernité permet aux Coréens de bien vivre la tradition. Par exemple, dans la maison traditionnelle la pièce principale dessert les pièces annexes, la chambre, la cuisine (le repas était traditionnellement fait hors de la maison). Il y a une coursive extérieure que l’on appelle le « maru » qui représente l’entre-deux, le monde extérieur « sale » et le monde de l’intérieur « propre », chauffé et rassurant. Quand on passe la porte, on laisse ses chaussures sales à l’extérieur, et ensuite je peux entrer dans la maison. Le chauffage de la maison traditionnelle est au sol, c’est le feu de la cuisine qui va alimenter le chauffage. C’est pour ça que la cuisine était à l’extérieur, alimentant le chauffage par un système de galerie sous la maison.
Le paysage urbain est aujourd’hui très différent de ce qu’on connaît en France?
Lorsque vous arrivez en Corée, on peut facilement croire que tout le monde vit dans des HLM, dans ces immenses immeubles d’une quarantaine d’étages. En réalité, ces immeubles-là, c’est le top de la modernité, mais les appartements sont construits sur le modèle des maisons traditionnelles. Vous avez par exemple un balcon qui fait le tour de l’appartement, le maru. Il faut préciser qu’il n’y a que deux appartements par étage, les plus riches vont mettre une vitre pour l’hiver, pour en faire un jardin d’hiver. Dans l’appartement, le chauffage est au sol. Les gens vivent et mangent donc par terre. On trouve aujourd’hui de temps en temps des tables dans les cuisines mais il est moins fréquent d’en trouver dans les salles à manger.
Et pourtant les Coréens semblent évoluer très vite ?
Oui, n’oublions pas qu’ils ont une grande appétence pour la nouveauté. Il suffit de leur expliquer que ce qu’on leur présente est nouveau, que cela a été déployé en République tchèque, qu’on a fait 30 % de gains en termes de temps de développement : ils n’ont pas besoin de comprendre plus, ils le prennent. Mais il faut que ce soit mesurable, appuyé par des chiffres, et le Coréen veut l’acquérir de suite. C’est pour ça que les Coréens adorent le benchmark. Quant aux traditions, par exemple au jour de l’An, les journalistes du journal télévisé sont en costume traditionnel. En France, ce serait impensable. Les fêtes traditionnelles sont très importantes, et tout le modernisme permet de mieux les vivre. Par contre, les Japonais, qui sont passés d’une société traditionnelle directement à une société postmoderne, ont un attachement très fort aux traditions, et il n’est pas envisageable de mélanger les deux du fait d’être traditionaliste, tandis que les Coréens vivent le traditionalisme grâce à la modernité. En France, on met en opposition la tradition et la modernité. Aux Pays-Bas, où j’ai également vécu, tous les samedis les gens vont au marché en sabots. Le samedi, c’est la tradition, la famille, le temps avec les amis.
Qu’en est-il de la structure sociale ? Y a-t-il une spécificité coréenne ou bien retrouve-t-on ailleurs son modèle d’organisation ?
Emmanuel Todd, démographe et historien, a travaillé principalement sur le thème de la parenté de la famille. Il s’est intéressé aux modes de transmission des héritages à travers le monde afin de comprendre les sociétés. Il a défini quatre grands groupes sociétaux. Il y a les sociétés libérales et inégalitaires. Ce sont les sociétés anglo-saxonnes, les États-Unis, la Grande-Bretagne, modèle libéral où on fait un peu ce qu’on veut, c’est le moi absolu. Il y a des sociétés qui sont libérales et égalitaires. C’est la société française. Il y a le modèle allemand qui est une société autoritaire et inégalitaire. En, Russie, en Serbie et dans une partie de la Chine, ce sont des sociétés autoritaires et égalitaires. En Corée du Sud et au Japon, on se trouve dans des sociétés autoritaires et inégalitaires.
Cependant, entre Corée et Japon, il y a des différences notables, non ?
Oui. On peut mentionner le fait qu’en Corée du Sud, ce que vont regarder les Coréens, c’est qui a le pouvoir ? Si c’est une femme qui a le pouvoir, elle est respectée au même titre qu’un homme, ça ne les dérange pas. Or, ce n’est pas le cas pour les Japonais qui feront tout ce qu’ils peuvent pour écarter les femmes du pouvoir. Néanmoins, dans les 163 entreprises publiques coréennes, il n’y a à l’heure actuelle aucune femme à leur tête. Il y en a eu une qui était à la tête de l’équivalent de la SNCF locale mais qui a démissionné pour se présenter aux législatives. Mais si des Françaises venaient à travailler en Corée du Sud, les Coréens n’auraient aucun problème pour les percevoir correctement dans la hiérarchie en fonction de leur statut.
Est-ce qu’on peut parler d’une autorité hiérarchique verticale dans les entreprises coréennes ?
Ce qui est ici singulier dans le rapport à l’autorité, c’est le confucianisme. Confucius cultive un modèle de société idéale : le prince doit être exemplaire, le roi doit être exemplaire, par rapport aux valeurs confucéennes et chacun a un rôle dans la société : le roi par rapport à ses ministres, le père par rapport à ses enfants, l’époux par rapport à l’épouse, il y a aussi un rapport à l’âge donc on est bien sur un modèle autoritaire. La seule subordination qui n’existe pas dans la société coréenne, c’est entre les amis, parce que les amis sont de même âge et de même sexe que vous, donc à partir de là il n’y a aucun lien de subordination. On a donc une structure autoritaire de la famille, pour que la société puisse fonctionner ; par translation l’entreprise est une seconde famille. Même si ce n’est jamais formulé ainsi, le patron tient le rôle du père, et on retrouve ainsi cette hiérarchie que l’on a dans la famille.
Les valeurs confucéennes impactent-elles de la même façon les sociétés extrême-orientales ?
Dans le modèle confucéen, quand le chef n’est pas bon on en change. La Corée a récemment destitué sa présidente (Park Geun-hye, en 2017). Le modèle confucéen a toujours existé en Chine mais, à l’époque de Mao, lors de la révolution culturelle, il a essayé profondément de bannir le modèle confucéen de la société, il y est quasiment arrivé. Mais attention : la Chine reste un pays profondément confucéen, elle utilise depuis quelques années le confucianisme pour légitimer sa position, pour être sûre que le pouvoir ne sera pas remis en cause. Un des points marquants dans la société chinoise moderne actuelle, c’est l’égalité homme femme qui n’existe pas dans le modèle confucéen. À l’heure actuelle, en Chine il y a une égalité homme femme et dans le monde de l’entreprise des structures de management sont largement occupées par des femmes et il n’est pas rare de voir des grandes femmes d’affaires être à la tête de fortunes et responsables d’un nombre d’employés colossal. On n’en est pas encore là en Corée ni au Japon.
Des évolutions en surface, pas en profondeur
Est-ce que la jeunesse d’aujourd’hui garde les mêmes envies que les aînés ou commence-t-elle à évoluer ?
Pour répondre, il faut avoir à l’esprit l’histoire des crises récentes. En 1997, au moment de la crise financière asiatique, tout le modèle coréen s’est écroulé comme un château de cartes et la Corée du Sud est devenue le pays le plus endetté au monde, mais elle avait quasiment un des meilleurs taux de développement au monde et surtout a réglé rubis sur ongle ses emprunts au FMI. C’est le gouvernement qui a alors décidé de l’orientation à prendre en termes de développement. Ils ont permis à Samsung, LG, SK de se développer, de sortir du pays, de nouer des partenariats extérieurs, ce qui a permis de relancer la machine économique en faisant ce choix stratégique. Quand il y a eu la crise des subprimes ils ont essayé de penser à un nouveau secteur d’activité qui pourrait être porteur, et ils ont choisi la production d’énergie verte, ce qui a très bien fonctionné en export mais ça n’a pas créé d’emplois. Et le pays s’est retrouvé dans une situation où il y avait 600 000 nouveaux diplômés qui sortaient de l’université chaque année à cette période, dont 10 % ne trouvaient pas de travail. 60 000 par an se retrouvaient ainsi sur le carreau, ce qui provoqua une grogne sociale très importante chez les jeunes.
D’où une cassure entre les générations ?
Oui. Beaucoup de jeunes Coréens témoignaient dans la presse de leur envie de quitter le pays. Normalement, le gouvernement doit assurer la prospérité et le bien-être de sa population. S’il n’y arrive pas, on change de gouvernement. S’il y a du désordre social, on change de gouvernement. Le gouvernement se trouvait donc dans une situation critique, il ne savait pas trop quoi faire. Ces 60 000 nouveaux diplômés sur le marché de travail se sont mis à créer des startups, il y a eu un bouillonnement économique. Le gouvernement au lieu d’indiquer quel serait le secteur privilégié a laissé faire et a ouvert le robinet des finances pour soutenir la recherche et le développement. Quand on regarde les chiffres de l’OCDE sur le montant de la part du PIB consacré à la recherche-développement sur vingt ans, c’est impressionnant : la Corée du Sud arrive maintenant au niveau d’Israël. A l’heure actuelle ce sont les deux pays qui consacrent la plus grande part de leur PIB dans la recherche-développement à travers le monde.
Est-ce que dans la mentalité de la jeunesse, l’individualisme peut prendre le dessus sur le groupe ?
Pas du tout. Vous êtes dans une culture du sous-groupe, vous n’existez qu’au travers du groupe. Quand vous rencontrez un Coréen, ce n’est pas un individu que vous rencontrez, c’est un représentant d’un groupe social. Les nouvelles générations respectent cette philosophie. Ça commence dès l’enfance en termes d’éducation, le premier groupe social auquel il appartient c’est la Corée, et le problème du Coréen c’est la perméabilité entre ce qu’il est et le groupe auquel appartient. Si vous critiquez le groupe auquel il appartient, alors il le prend pour une critique personnelle.
Un test a été réalisé à Séoul où plusieurs sacs avec des fleurs et, semble-t-il, des confiseries étaient déposés à différents endroits dans le métro. 87 % des sacs ont été retrouvés au niveau du service des objets trouvés. Quel est le niveau d’honnêteté du Coréen selon vous ?
Le Coréen est très honnête, je suis même étonné qu’il n’y ait pas eu 100 % de retour. Il n’y a pas d’incivilité. Tous les jours les enfants vont à l’école en se tenant la main seule sans que les parents ne soient présents. Les enfants vont dans la rue en toute sécurité et c’est l’ensemble du groupe qui les surveille. Si un enfant commence à traverser la rue au mauvais endroit, il y aura une grand-mère ou un passant qui ira le rattraper et le remettre sur le bon chemin.
Existe-t-il une criminalité ou une mafia en Corée du Sud ?
Il y a eu une mafia sur le modèle japonais les yakuzas, mais ils ont été totalement éradiqués pendant la dictature (dans les années 60-70). Ce qui est amusant lorsque l’on regarde le cinéma sud-coréen, on imagine une société hyper violente ! Les Coréens sont paradoxaux et ils gèrent leurs contradictions, leur drapeau est une association de contraires, c’est le yin et le yang, le jour et la nuit, le soleil et la lune, l’homme et la femme, avec aussi les hexagrammes de la terre et du ciel, du feu et de l’eau. L’équilibre entre tous ces contraires vous amène à l’harmonie qui est représenté par le blanc. Intérieurement, le Coréen est toujours en train de bouillonner, mais extérieurement il garde une face neutre, parce qu’il faut savoir garder la maîtrise de ses émotions. En Corée, quand vous prenez un engagement, vous devez le tenir mais l’engagement dépend du contexte et si le contexte évolue le même engagement n’est pas forcément tenu. C’est l’erreur du droit commercial américain : quand vous signez un contrat, il est généralement très épais, il correspond au droit du Colorado. Chez les Coréens, comme les Japonais et les Chinois, le contrat tient sur trois feuilles. Les Coréens ne lisent pas les contrats : si on tombe d’accord, alors on travaille ensemble. Et si on s’entend sur un chiffre et que douze mois après le marché a évolué, alors on se remet à table et on renégocie.
Merci beaucoup M. Vojinovic d’avoir pris le temps pour ces échanges très enrichissants!
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