Etudes de cas, Europe, Ferroviaire, France, Gestion des risques, Pays, Sécurité

Les Français ont-ils une relation contextuelle aux règles ? Exploration culturelle à partir du cas de l’accident d’Eckwersheim

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Depuis 2013, je suis responsable d’un module de 30 heures de cours en master TraDD (Transport et Développement Durable) proposé conjointement par l’École des Ponts ParisTech, Mines ParisTech et l’École Polytechnique associées à la Fondation Renault. Il s’agit d’un cours sur la communication interpersonnelle et interculturelle.

La promotion de cette année comprenait 22 étudiants de 11 nationalités différentes (Algérie, Allemagne, Brésil, Chine, Colombie, France, Grande-Bretagne, Liban, Maroc, Russie, Turquie). Signalons que les cours et les travaux ont lieu en français. Chacun pourra imaginer le défi que représente pour beaucoup de ces étudiants le fait de suivre une formation exigeante dans une langue autre que sa langue natale.

Pour valider leur module, les étudiants travaillent en groupes sur des sujets que je m’efforce de construire pour rencontrer des problématiques très concrètes. L’objectif est de les former à la prise en compte des facteurs humains et culturels dans l’analyse d’enjeux industriels et économiques.

L’année dernière, j’avais mis en ligne l’un des exercices de la promotion précédente. Il s’agissait d’une présentation des enjeux interculturels franco-néerlandais à partir de l’étude de cas d’Air France-KLM (voir ici). Avec l’accord de l’encadrement du master et des étudiants, je tiens à partager un des travaux de cette année, soutenu la semaine dernière.

Le dossier présenté ici a été réalisé par quatre étudiants: Bruno Almeida Maximino (brésilien), Irina Beltcova (russe), Moritz Kleine, (franco-allemand), Talita Ribeiro Itto (brésilienne). Ils ont travaillé sur un sujet difficile que j’ai bâti à partir de l’accident ferroviaire d’Eckwersheim (11 morts) survenu le 14 novembre 2015, le lendemain des attentats de Paris, d’où un écho limité dans la presse :

Il s’agissait de répondre à la question: Les Français ont-ils un rapport contextuel aux règles ? en partant de l’étude du cas de l’accident d’Eckwersheim.

Le sujet comportait lui-même trois questions à la difficulté croissante :

  1. Est-ce que l’accident d’Eckwersheim donne des exemples de certaines règles appliquées contextuellement?
  2. Que signifie une application contextuelle des règles?
  3. S’il y a en France une tendance à appliquer les règles de façon contextuelle, comment expliquer ce phénomène?

Parmi les exigences:

  • Le rapport final doit comprendre une fiche d’une page appelée Executive summary ou résumé opérationnel, qui doit être conçue et mise en forme pour un décideur qui dispose de deux minutes pour prendre connaissance de l’essentiel des analyses et conclusions.
  • Les analyses doivent être rédigées sous formes de notes et articles à partir de sources variées et vérifiées.
  • Ces analyses doivent être enrichies par des entretiens avec des experts.
  • Le dossier doit comprendre vingt pages et inclure les sources, la liste des experts interrogés et les comptes-rendus d’entretiens.
  • Les étudiants préparent deux oraux : l’un pour présenter en 15mn l’état d’avancement de leurs recherches à mi-parcours et l’autre pour présenter l’état final de leur rapport dans le cadre limité de 20mn.

Je tiens à féliciter les étudiants qui ont réalisé le dossier présenté ici. Il dépasse le cadre d’un mémoire d’étudiants: il s’agit d’une véritable exploration des facteurs culturels qui entraînent un rapport contextuel aux règles en France. Personnellement, je ne vois pas ce que j’aurais pu écrire de mieux sur le sujet.

Cette étude – réalisée, rappelons-le, par deux Brésiliens, une Russe et un Franco-Allemand – devrait être lue :

  • par tout Français qui cherche à mieux comprendre pourquoi il entend (et dit) si souvent « Ça dépend… » ou bien « Normalement, il faut faire ainsi, mais… » ;
  • par tout étudiant en management interculturel qui trouvera là l’exemple d’une étude qui utilise les outils et concepts de l’interculturalité pour explorer avec finesse et profondeur un sujet très concret à partir d’une étude de cas;
  • par tout enseignant en management interculturel qui s’interroge sur la manière de diversifier les sujets de mémoire des étudiants, lesquels tournent trop souvent autour de la question trop vaste et trop vague : « Quelle est la valeur ajoutée du management interculturel pour les entreprises ? »

Vous pouvez donc accéder à leur dossier en cliquant ci-dessous:

Lien rapport 2Mo

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Quelques suggestions de lecture:

2 Comments

  1. Travail remarquable, avec de nombreuses références. Une source d’inspiration et de réflexion pour les managers en général et les HSE en particulier…

    Une question : les règles sont certes fixées par des élites, mais n’y a-t-il pas aussi un phénomène miroir voir mimétique qui fait que des collaborateurs (hiérarchie intermédiaire par exemple) établissent/proposent des règles à leur hiérarchie pour répondre à un problème : “vous avez vu chef, j’ai fait le job : j’ai établi une règle !” ?

  2. Benjamin PELLETIER

    @JF – Tout à fait d’accord avec ce phénomène “miroir” que vous signalez… C’est un cercle vicieux qui se met ainsi en place à différents niveaux hiérarchiques: Problème, donc règle, nouveau problème, nouvelle règle, etc.

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