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Qu’est-ce qu’un formateur en management interculturel ?

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Mise au point préalable

Je ne compte plus les messages que je reçois de la part d’étudiants en fin de cursus et en quête de sujets de mémoire, d’expatriés de retour en France cherchant à valoriser leur expertise pays, de cadres en reconversion en train de monter leur cabinet de conseil ou de consultants en management souhaitant intégrer de nouvelles expertises dans leur offre commerciale.

Tous me demandent comment on devient formateur en management interculturel, comment on construit une formation en management interculturel, comment on développe sa clientèle dans ce secteur, si je peux les conseiller et orienter, etc. La plupart veulent me rencontrer, me téléphoner, me questionner. Parfois, c’est une demande abrupte, sur la base d’aucun échange ni réel partage.

Je peux rarement donner suite à ces sollicitations. D’abord, parce qu’elles sont si nombreuses que si je répondais favorablement à toutes je devrais leur consacrer tout mon temps, je dis bien tout. Ensuite, parce qu’elles doivent être initiées sur la base d’un intérêt commun. Les plus belles rencontres le sont avec des personnes portant un réel questionnement et recherchant l’intérêt mutuel lors de nos échanges.

Enfin, bien qu’il y ait une importante matière mise en ligne sur ce blog qui donne un aperçu assez complet de l’activité de formateur en management interculturel, certaines sollicitations démontrent que leur émetteur n’a pas jeté un œil à une seule page du blog où, pourtant, il trouverait quantité d’articles répondant à ses questions.

Ma réponse type

Elle est simple. Formateur en management interculturel, ce n’est ni un rêve d’enfant comme pompier ou pilote de ligne, ni un métier qui s’acquiert en passant un examen ou un concours. C’est un devenir, la suite logique d’un parcours et d’un goût : un parcours multiculturel, multidisciplinaire et un goût pour la pédagogie, la transversalité et les problématiques managériales. Rien de cela n’est donné ni évident, il faut savoir se remettre en question et évoluer en permanence.

Ensuite, le management interculturel suppose au préalable une importante expérience en entreprise à l’international, une très solide culture générale, une capacité à assimiler des sujets techniques, l’expérience de l’animation de groupes d’adultes, le recul et la maturité pour entrer dans le fonctionnement intrinsèque de pensées étrangères, un suivi quotidien des évolutions des entreprises, de l’économie, de l’actualité.

Ma réponse type reste assez générale. Je ne serai pas plus précis sur la façon d’élaborer un programme, ni sur le contenu détaillé des formations ou l’approche commerciale. A la question de savoir comment développer une clientèle, je réponds toujours que la base reste d’abord de développer de l’expertise et de la partager – évidemment sans se tirer une balle dans le pied en mettant en ligne ce qui est commercialisé.

Une réponse plus spécifique

Cependant, j’apporterai quelques précisions sur la définition de la fonction de formateur en management interculturel. J’ai déjà mis en évidence la typologie des risques interculturels, et surtout le curseur des risques interculturels où figure l’importante distinction entre connaissance culturelle et compétence interculturelle. Ces deux articles permettent de se faire une idée des enjeux liés au management interculturel. Mais le formateur lui-même, comment déterminer sa fonction ?

Prenons comme point de départ les deux grands types de demande en formation interculturelle. La plupart des entreprises me contactent soit pour des expatriés à former avant leur départ, soit pour des collaborateurs en interaction avec des collègues et partenaires étrangers. Elles formulent donc une demande d’apport de connaissances sur la culture professionnelle du pays d’affectation ou de développement des compétences interculturelles.

Il est nécessaire de préciser ici combien la connaissance culturelle ne saurait être séparée des compétences interculturelles. On peut en effet être un expert de la culture japonaise tout en n’ayant aucune compétence pour travailler avec des Japonais. De même, il est illusoire de développer des compétences interculturelles sans un apport important de connaissances culturelles.

Le formateur en management interculturel trouve donc sa place entre deux pôles :

  • Il apporte des connaissances sur les cultures : en ce sens, le formateur peut s’apparenter au professeur.

Mais un formateur qui jouerait le rôle d’un professeur serait un mauvais formateur car une formation n’est pas un cours magistral. Dans ce rapport maître/élève, la passivité du public n’est pas pour le formateur le gage d’un respect intellectuel mais l’indice d’un échec.

  • Il développe des compétences relationnelles : en ce sens, le formateur peut s’apparenter au médiateur, et plus spécifiquement au médiateur interculturel.

Voici comment Thierry Baranger, juge pour enfant, définit la médiation interculturelle en contexte judiciaire :

« La médiation se veut un passage, un espace transitionnel, un « entre-deux », une passerelle entre deux mondes. Il s’agit donc d’un processus : elle doit permettre, à la fois, de clarifier les représentations réciproques mais également de faire apparaître des correspondances exploitables dans l’intérêt de chacun, de faire accéder à une représentation culturelle différente de la sienne. » (Médiation et diversité culturelle, C. Younes et E. Le Roy)

Mais le formateur qui ne serait que médiateur manquerait d’efficacité dans le temps très limité qui lui est imparti. Alors que le médiateur interculturel est un passeur et interprète des représentations de chacun, le formateur dépasse la position de neutralité du médiateur : il explique, conseille, oriente. Par ailleurs, il n’a pas toujours affaire aux deux parties en présence mais à une seule, ce qui complique sa tâche. Ceci étant dit, le formateur en management interculturel est plus proche du domaine de la médiation interculturelle que de celui du professorat.

Voici donc comment l’on pourrait visualiser la fonction et le territoire du formateur en management interculturel qui se trouve en relation avec les fonctions de professeur et de médiateur sans pour autant s’y réduire, tout en devant transmettre son message via de fortes interactions (exercices en groupe, cas pratiques, mises en situation, jeux de rôles, etc.) avec et entre les participants :

* * *

  • Vous avez un projet de formation, une demande de cours ou de conférence sur le management interculturel?
  • Vous souhaitez engager le dialogue sur vos retours d’expérience ou partager une lecture ou une ressource ?
  • Vous pouvez consulter mon profil, la page des formations et des cours et conférences et me contacter pour accompagner votre réflexion.

Quelques suggestions de lecture:

4 Comments

  1. L’interculturalité intrigue, interroge, laisse perplexe. Bravo pour cette tentative de définition qui ne circonscrit pas le rôle du formateur en management interculturel à une case comme nous aimons tant le faire en France !

  2. Benjamin PELLETIER

    @Charef – Il est difficile en effet de circonscrire un domaine très précis car les parcours et les profils des formateurs en management interculturel sont d’une très grande variété. On peut être formateur en management interculturel avec une dominante ou expérience majeure en “commerce international”, ou “psychologie”, ou “sociologie”, etc. Le cœur du métier restant cependant le même: il faut parvenir à ce que des collaborateurs divers dépassent leur propre diversité pour percevoir et/ou produire des complémentarités auparavant inaperçues et/ou inexistantes.

  3. Mille mercis, Benjamin !

    Vous venez de me faire gagner un temps précieux. Maintenant, quand je recevrai (encore et toujours…) le même type de courriel que vous, je renverrai mon interlocuteur vers ce billet. Tiens, je vais même préparer un courrier-type.. C’est d’accord, yes ? Vous me le permettez ?

    Le besoin est tellement énorme que bon nombre se ruent sur ce créneau. D’un côté nous avons ceux qui poursuivent un beau cursus universitaire (mais l’interculturel ne s’apprend pas dans un bouquin, c’est du vécu) et de l’autre les époux (pour ne pas dire épouses…le monde est toujours ainsi…) de “serial expatriés” qui, certes, ont une expérience terrain, mais pas forcément en entreprise.

    Pas facile pour les entreprises d’y voir clair et de choisir le bon prestataire pour répondre à leurs besoins.

  4. Benjamin PELLETIER

    @Patricia – L’idée, c’est tout de même de répondre aux interrogations mais, comme vous le constatez aussi, il y a des sollicitations si nombreuses – et parfois si abruptes – qu’il n’est pas inutile de rappeler les efforts énormes que demande une activité en indépendant. A mon sens, il faut au minimum deux ans de travail quotidien et sans vacances pour pouvoir émerger…
    Par ailleurs, un seul article sur le blog me demande en moyenne 12 à 15h de travail. Il y en a 190 actuellement, soit entre 2000 et 3000 heures travaillées sans rémunération pour partager de l’information et des analyses…
    Ce sont ces éléments qu’il faut bien avoir à l’esprit quand on veut se lancer dans ce domaine – et ne pas espérer que par un simple mail ou un coup de fil on va obtenir une réponse donnant magiquement les clés pour réussir rapidement.
    Ceci dit, le blog est un formidable moyen de faire de très belles rencontres qui n’auraient jamais eu lieu sans cela…

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